Margarette Palombe tomba des nues lorsque
la sentence, prononcée comme un coup de tonnerre, résonna dans le tribunal.
Réclusion à perpétuité. Elle ne pouvait croire en la culpabilité de son fils.
Eddy avait certes de nombreux défauts, mais de là à être un meurtrier de sang
froid ! Il eut beau crier son innocence, il ne put prouver la théorie du
complot qu'il avait choisie pour sa défense. Non seulement il n'avait aucun
alibi pour les meurtres, mais l'avocat général avait en sa possession de
nombreux éléments à charge : l'arme du crime avec ses empruntes et les
témoignages d'un certain nombre d'honnêtes gens qui l'avaient vu sur les lieux
des meurtres, ce que même Eddy ne pouvait réfuter. En effet, il s'était bien
trouvé à chaque fois sur les lieux et à l'heure des crimes. Le complot était
impossible à démontrer. Pourtant, il avait été mis en scène avec une simplicité
enfantine par le véritable meurtrier. Eddy n'avait pas été une proie difficile,
bien au contraire. Tisser une toile pour une araignée n'a rien de compliqué,
c'est inné pour elle. Il suffit à l'araignée de connaître la direction de sa
proie et de parier sur sa stupidité pour l'attraper. Eddy était clairement
stupide, quant à sa trajectoire, elle n'était pas, pour quelqu'un d'un peu
moins idiot que lui, difficile à deviner. Le plus dur, lors des six mois que
durèrent le procès, fut d'entendre de la bouche de l'accusation l'ignoble
portrait qu'ils avaient fait de lui et qui dès le lendemain, s'était retrouvé
aussi bien en première page des journaux qu'au sommaire du journal télévisé.
Vieux garçon, alcoolique, pervers et vicieux, frustré sexuellement, avec un
passif de petit délinquant sans envergure. Bref, le type même du raté et du
psychopathe en puissance. Margarette se disait à chaque fois, en regardant les
visages méprisants et parfois grimaçants du jury : « Non, n'écoutez pas ces
mensonges, ce n'est pas mon fils » avec l'espoir qu'ils la regardent et voient
dans ses yeux toute la vérité sur son fils. Car elle seule le connaissait. Elle
seule l'avait élevé. Tout n'avait pas été rose. Tout n'avait pas été parfait.
Malgré tout, il y avait eu de l'amour, et jamais son fils n'aurait pu commettre
de telles atrocités. Mais aucun d'entre eux ne la prêta attention; leurs
visages se firent de plus en plus sévères. Quand Margarette vit le président du
jury se lever droit comme un soldat, elle se crut elle-même résignée à la
sentence qui attendait son fils. Au son de la voix qui prononça haut et clair
le verdict implacable avec la satisfaction de la justice rendue, elle comprit
avec effroi à quel point elle avait encore eu l'espoir qu'il soit innocenté.
Elle s'effondra en larmes et ne put lever les yeux sur son fils, menotté et
escorté par des agents de police, quittant le palais.
Extrait de "L'appel anonyme" - Nouvelle fantastique et image Teddy Wadble - 2 mai 2015
Extrait de "L'appel anonyme" - Nouvelle fantastique et image Teddy Wadble - 2 mai 2015